Propos recueillis par Clémentine Voinchet
Depuis 18 ans, Isabelle Henry, responsable de la formation piscine à l’IFIR, CFA Multi secteurs de Lyon, accompagne les futurs techniciens piscinistes dans leur formation. D’année en année, elle suit le parcours des apprentis avec attention et se réjouit de leur réussite. Entretien avec une responsable de formation émérite.
En quoi consiste votre rôle de responsable de formation des métiers de la piscine ?
Je travaille conjointement avec le Lycée de Pierrelatte, le centre Cap formation de Toulouse et le centre AFPA de Clermont-Ferrand. Je récupère sur notre plateforme tous les dossiers de candidature et les examine. Je suis généralement le premier contact des personnes qui postulent. Chaque année en mai, à Pierrelatte, une journée de rencontre avec les candidats est organisée. Nous leur faisons passer un entretien et des tests. Il s’agit également d’une sorte de journée portes ouvertes, où ils vont pouvoir visiter les locaux et commencer à chercher un logement.
Quelles sont les formations de piscinistes proposées par l’IFIR ?
Au Lycée Gustave Jaume de Pierrelatte, deux formations sont proposées, le Brevet Professionnel pisciniste et le Titre Professionnel de Technicien d'Équipement et de Maintenance de Piscines. Ces deux formations sont dispensées en apprentissage. Le BP se fait en 2 ans, il s’agit d’un diplôme de niveau 4 de l’éducation nationale. Le titre professionnel est délivré par le Ministère du Travail et se réalise en un an. Le Titre Professionnel concerne fréquemment les personnes en reconversion professionnelle. A Pierrelatte, nous l’avons ouvert l’année dernière pour les contrats d'apprentissage, à destination des jeunes de moins de 30 ans.
Les inscrits peuvent être des jeunes qui ont poursuivi leurs études après le BAC et souhaitent compléter leur formation avec les métiers de la piscine. Il peut également s'agir de jeunes qui, au contraire, ont un niveau scolaire assez faible, mais qui bénéficient déjà d'une expérience professionnelle dans les métiers de la piscine et qui ne souhaitent donc pas étudier deux ans.
Le titre professionnel touche donc un public assez large, c’est une formation qui fonctionne bien et satisfait tous les jeunes qui cherchent à devenir technicien pisciniste.
Comment se déroule la formation ?
Les cours techniques sont entièrement dispensés par des professionnels. En ce qui concerne le volume horaire par semaine, cela varie entre 30 et 35 heures par semaine. Les apprentis sont en formation de septembre à mars, et alternent entre 4 semaines de cours et 3 semaines en entreprise. A partir du mois d’avril, ils sont complètement en entreprise et reviennent à l’école en septembre.
Comment accède-t-on aux métiers de la piscine ?
Dans nos formations, nous retrouvons des jeunes qui sortent de BTS, de CAP, du BAC.. C’est vraiment très hétérogène. Pour accéder au Brevet Professionnel, il faut forcément posséder un diplôme de niveau 3, et donc un BEP ou CAP. Pour le titre pro, on recrute à partir du niveau CAP, mais il faut déjà posséder une petite expérience dans le bâtiment.
Est-il possible d’intégrer les études de métiers de la piscine sans avoir d’expérience professionnelle dans le milieu du bâtiment ?
Oui bien-sûr, à partir du moment où on a le niveau CAP. Le Brevet Professionnel est très complet, en deux ans, les élèves acquièrent rapidement les notions techniques sans aucun souci. Pour se diriger vers ces métiers-là, il faut avoir une appétence technique, être intéressé par le bâtiment.. On a même déjà accueilli des jeunes qui sortaient d’un bac littéraire !
Le métier de pisciniste est accessible à tous, dès lors que l’on est intéressé par la construction, l’artisanat.
Quelles sont les différences entre la formation du BP en deux ans et le Titre Pro en une année ?
Le premier se réalise en 1050 heures, l’autre en 420 heures. Le Brevet professionnel, qui est un diplôme de l’Education nationale, est composé d’une grande partie d’enseignement général. On repart sur des maths, du français, de la physique-chimie, de l’histoire géo, de l’anglais.. Le titre pro est vraiment axé sur l’aspect professionnel, la formation est beaucoup plus condensée. Le BP est quand même plus complet, puisque l’on va aborder la construction, les équipements et la rénovation des piscines privées. Le titre pro prépare à devenir technicien d’équipement et de maintenance des piscines, il cible essentiellement la réparation, l’équipement, l’aménagement des bassins et leur rénovation.
Celui qui dispose du Titre professionnel a donc moins de responsabilités, est moins qualifié ?
Non. Il est également technicien, mais au niveau de la construction, il s’appuiera effectivement davantage sur un maçon ou un pisciniste. L’idée est que ce public soit davantage formé à tout ce qui concerne l’équipement et la maintenance de la piscine. Cela comprend l’entretien, la rénovation et tout ce qui est lié à la piscine : le local technique, les volets, les nages à contre-courant.. Tout ce qui existe en matière d’équipement de piscines.
L’accueil des candidats au Titre Professionnel est réservé aux personnes de 16 à 29 ans. Pourquoi y a-t-il une restriction d’âge ?
La restriction d’âge est liée au contrat d’apprentissage. L’apprentissage se fait forcément avant le trentième anniversaire. Pour le moment, on a une telle demande à Pierrelatte qu’on ne l’a ouvert qu’en contrat d’apprentissage. Si on le pouvait, on ouvrirait aussi une promotion à destination des personnes en reconversion professionnelle, mais nous n’avons pas assez de place !
Comment répartissez-vous les étudiants qui se tournent vers l’IFIR de Lyon dans les différents centres d’apprentissage ?
Au niveau des établissements scolaires répartis sur la France, nous essayons de le faire de façon intelligente, par territoires. A Pierrelatte, nous accueillons essentiellement des jeunes qui viennent d’Auvergne-Rhône-Alpes ou d’Occitanie. Nous devenons cette année, en 2022, le CFA de Toulouse, qui ouvre son BP métiers de la piscine. Nous sommes également le CFA de Clermont-Ferrand depuis cette année, où nous avons ouvert une filière de Titre Professionnel avec l’AFPA. Une première promotion a fait sa rentrée en janvier, la seconde débutera en septembre. C’est intéressant, car il n’y avait pas du tout de formation de piscinistes au centre de la France !
Le public qui se forme au métier de pisciniste est-il plutôt masculin, ou se féminise-t-il un peu ?
Il y a 90%, voire 95% et parfois 100% de garçons. Il y a de temps en temps une fille ou deux qui arrivent, mais c’est un domaine qui reste quand même très masculin. Les filles y trouvent pourtant leur compte quand elles font leur formation, et se débrouillent très bien !
Même si on parle de métiers de la piscine, ça reste le bâtiment.. Ce n’est pas évident de changer les mentalités.
Les apprentis rencontrent-ils des difficultés pour trouver une entreprise qui les accueille en apprentissage ?
Dans les métiers de la piscine, à partir du moment où le dossier du candidat est correct, le premier piscinier qu'il trouve près de chez lui l’embauche de suite ! Il y a une telle demande de compétences que le jeune trouve immédiatement.
Si le candidat est motivé, sérieux et assidu, il n’y a aucun problème. Actuellement, les entreprises recherchent davantage de “savoir-être” chez le candidat, que d’excellents résultats scolaires.
Une fois le diplôme de Technicien pisciniste en poche, quelles sont les perspectives d’évolution des apprentis ?
Ils restent souvent dans leur entreprise et peuvent évoluer au sein de celle-ci. Ils sont également en mesure de devenir chef de chantier, ou de créer leur entreprise. Pour ceux qui sont plus sensibles à la relation client, ils ont la possibilité de basculer sur du commercial. Certains souhaitent aussi travailler chez des fabricants. Certains, très vite, parfois même à la sortie de la formation, montent leur entreprise !
Je m’occupe de cette formation depuis 18 ans et constate que premiers élèves travaillent toujours dans ce domaine. Cela veut dire que le métier leur plaît, qu’ils y trouvent leur compte et que pour certains, ils réussissent très très bien !